Gaz naturel : les exportations américaines rebattent les cartes en Europe

Les capacités d’exportation des uns évoluent, les besoins des autres fluctuent… Sur le marché de l’énergie, les cartes sont sans cesse redistribuées. Un exemple ? Il y a un peu plus d’un an, nous vous expliquions que le GNL revenait en Europe, plutôt que d’être détourné vers l’Asie ! Cette année, c’est une étude réalisée par l’IFRI qui nous l’apprend : le gaz naturel venu des États-Unis brouille les lignes de son marché. Explications.

Sommaire

Qui est l’IFRI ?

L’IFRI (Institut Français des Relations Internationales) est le principal centre indépendant de recherche, d’information et de débat consacré aux grandes questions internationales. Il publie régulièrement des dossiers d’analyse, sur des sujets très variés (l’énergie, la politique, la géopolitique, l’économie, l’espace, la défense…).

Une première livraison en février dernier

La question du gaz de schiste a profondément modifié le marché américain, et ce pour deux raisons :

  • l’abondance des ressources ;
  • la forte hausse de la production.

Conséquence ? Le gaz de schiste a vu son prix baisser sur le marché local, sur lequel il s’est retrouvé en abondance. Les producteurs se sont alors tournés vers l’exportation, afin de trouver des prix plus intéressants. Après un débat parfois houleux, les exportations de gaz de schiste américain ont débuté en février dernier. Une cargaison de GNL est en effet partie de l’unité de liquéfaction de Sabine Pass, pour rejoindre le Brésil. Cela ne devrait être qu’un début : quatre unités de liquéfaction sont en construction aux États-Unis !

Les caractéristiques de l’exportation américaine du gaz de schiste

Ce qui rend le gaz de schiste américain si particulier, ce sont les caractéristiques de ses contrats d’exportation. Ceux-ci sont radicalement différents des contrats traditionnels d’approvisionnement en GNL :

  • Les prix sont indexés sur le prix spot américain, ce qui permet aux acheteurs une diversification des prix par rapport aux contrats indexés sur le prix du pétrole.
  • Les contrats sont flexibles : ils ne comportent par exemple pas de clause de destination, l’acheteur peut donc revendre son GNL sur le marché de son choix.
  • Des coûts de construction des terminaux d’exportation inférieurs aux autres projets, car ils sont situés sur d’anciens terminaux de réception du GNL.

L’Europe, un marché "de secours" pour le gaz de schiste américain ?

Le gaz de schiste américain marque donc une rupture par rapport aux contrats classiques d’approvisionnement en gaz naturel. L’Europe semble devoir se préparer à voir ce GNL arriver de plus en plus fréquemment sur son sol - notamment parce que celui-ci se détourne du marché asiatique, sur lequel la demande a fortement ralenti.

De quoi modifier en profondeur le marché de l’énergie sur le Vieux Continent ? Pas tout de suite : les prix du gaz "classique" sont actuellement suffisamment bas en Europe pour ne pas imposer le recours au gaz de schiste américain. De plus, les marges sont plus importantes sur d’autres marchés (comme l’Amérique latine ou le Moyen-Orient) pour les exportateurs américains. Le marché européen semble donc être un marché de secours, dans l’état actuel des choses, pour le gaz de schiste américain.

En revanche, les pratiques contractuelles des exportateurs américains impliquent une adaptation des autres pays exportateurs. Laquelle s’est enclenchée récemment, notamment en ce qui concerne la flexibilité des contrats et la fixation des prix. À suivre !

Le gaz de schiste américain offre certains avantages pour les importateurs. Néanmoins, le prix du gaz naturel étant assez bas en Europe et les marges plus larges sur d'autres marchés, le gaz naturel a encore de beaux jours devant lui sur le Vieux Continent.

Source de l'image à la Une : Flickr (Bill Couch)