Anticiper le montant de la compensation stockage en 2023.

Le stockage du gaz naturel en France (un peu de contexte)

En France, 2 opérateurs se partagent la quasi-totalité des capacités de stockages disponibles dans l'hexagone : Storengy et Teréga. Grâce aux infrastructures de ces deux acteurs, la France est en mesure de stocker 30% de sa consommation annuelle de gaz naturel afin de préparer la période hivernale.

Les infrastructures de stockage peuvent être de plusieurs types. Le plus répandu est le stockage aquifère qui consiste à injecter le gaz naturel, sous pression, dans des nappes d’eaux souterraines jusqu’à prendre sa place dans le réservoir. Le deuxième type de stockage se fait dans des cavités salines en y creusant par injection d’eau douce de vastes réservoirs sous la surface pour y injecter le gaz naturel. Enfin, il est également possible de stocker le gaz naturel dans d’anciens gisements gaziers.

Une infrastructure de stockage se caractérise par sa capacité de stockage ainsi que par la rapidité avec laquelle il est possible de la remplir et de la vider. Cette information a de l’importance car un stockage qu’il est possible de vider en quelques jours a bien plus de valeur dans la mesure où il permet de répondre aisément à d’éventuels pics de consommation.

Comment est financée l’activité stockage en France ?

Afin de financer l’activité des opérateurs de stockage, la Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) détermine un montant de revenu autorisé. Ce montant est censé permettre aux stockeurs : 

• de couvrir leurs frais de fonctionnement
• de mener toutes les maintenances nécessaires au maintien de l’infrastructure
• d’investir dans de nouveaux moyens techniques afin d’améliorer le service

Pour atteindre le niveau revenu déterminé par la CRE, la première étape consiste à organiser des enchères nationales au cours desquelles toutes les capacités de stockages sont mises en vente. Des fournisseurs d’énergies ou des traders viennent acheter des capacités de stockage (pour y acheter du gaz naturel et l’y placer dans l’espoir de réaliser une marge l’hiver suivant).

Une fois les enchères passées avec succès, ce qui reste à financer est pris en charge par la compensation stockage. Aussi pour tenter d’évaluer le montant de la compensation stockage il est nécessaire de connaître le montant du revenu “autorisé” des opérateurs, la différence de prix Eté-Hiver parce qu’ils impactent le résultat des enchères, qui elles même auront un impact sur ce qu’il reste à payer pour atteindre le revenu cible à livrer aux opérateurs de stockage ! Rien de bien compliqué ? Regardons ça de plus près.

Comment anticiper le montant de la compensation stockage ?

Revenu autorisé = Revenu des enchères + Compensation stockage

donc

Compensation stockage = Revenu autorisé - Revenu des enchères

a) Les revenus “autorisés” des opérateurs.

Afin d’évaluer le Terme Stockage, il est essentiel de bien avoir en tête le revenu cible, appelé revenu “autorisé”. Ce dernier est fixé chaque année par la Commission de Régulation de l'Énergie et pour 2023-24 il a été fixé à 541,4 millions d’€ pour Storengy (contre 514,6 millions d’€ l’année dernière) et 167,7 millions d’€ pour Téréga (contre 157 millions d’€ l’année dernière). 

Revenu autorisé depuis 2018

Quand le revenu autorisé augmente, cela doit nécessairement être complété soit par la compensation stockage, soit par le revenu des enchères… Hors ces dernières n’ont rien d’un revenu garanti dans la mesure où elles sont tributaires du spread été-hiver. 

b) Le spread été-hiver

Un système d’enchères a été mis en place afin de financer une partie de l’activité des opérateurs de stockage en France et ce dernier est largement impacté par les différences de prix entre l’été, pendant lequel nous achetons du gaz pour le stocker, et l’hiver prochain, pendant lequel nous espérons pouvoir vendre ce gaz à un prix plus élevé en réalisant une marge.

Ainsi quand les prix de l’hiver à venir sont bien supérieurs à ceux de l’été, un certain nombre d’acteurs sont économiquement motivés à acquérir des capacités de stockage pour la saison. 

Lors de la dernière période d’injection, durant l’été 2022, les prix étaient extrêmement élevés. Le Spread été - hiver n’avait absolument aucune raison de motiver des fournisseurs ou des traders à souscrire des capacités de stockage…

c) Les revenus issus des enchères

Mais contre toute attente, les revenus des enchères de stockage ont tout de même augmenté… De 80% pour Storengy et de 40% pour Téréga. Comment ont-ils pu augmenter en dépit de conditions de marché aussi défavorables ?

La réponse tient dans l’importance qu'ont revêtu certains types de stockages dans un contexte de crise énergétique intense… Ceux disposant de capacités de soutirage rapides ont obtenu des revenus très importants compensant largement le nombre important d’enchères terminant à 0€ cette saison.

d) La “modulation hivernale” des clients

Enfin, un dernier point doit être considéré afin d’évaluer le montant de la compensation stockage… Il s’agit de la modulation hivernale qui désigne, en résumé, la proportion de gaz naturel utilisée par les Clients d’un gestionnaire de réseau pendant la période hivernale vs la période estivale. Cette valeur n’a toutefois pas vocation à évoluer énormément d’une année sur l’autre.

Sur la base de tous ces éléments, nos experts pricing estiment que le Terme Stockage se situera entre 245 et 260€/MWh/j/an. Autrement dit le Terme Stockage avait des chances d’augmenter compte tenu de l’augmentation des revenus “autorisés” ainsi que du Spread Été - Hiver mais ça ne devrait pas être le cas compte tenu du résultat “étonnant” des enchères cette année.