Et si le torchage du gaz partait définitivement en fumée ?

Perçu, à raison, comme un gaspillage d’énergie menaçant l'équilibre de l'environnement, le torchage du gaz sur les sites d'extraction de pétrole est une pratique qu’il faut tenter d’endiguer. Quels en sont les effets ? Quelles alternatives s'offrent aux industriels pour changer de procédé ?

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Le torchage du gaz à la loupe

Lors de l'extraction de pétrole, du gaz et de l'eau peuvent remonter en surface. Une fois séparé de l’eau et du pétrole, le gaz, considéré comme un sous-produit, est brûlé sur site faute d'infrastructure de traitement (unité de liquéfaction, de compression, de purification) ou de transport (gazoduc).

D'autres situations, plus ponctuelles, peuvent aussi amener les industriels à avoir recours au torchage du gaz : les manipulations liées à la sécurité du site, les surpressions, l'arrêt de certains équipements ou les phases d'exploration.

Dénoncée depuis les années 1950, cette pratique est désormais une problématique environnementale mondiale. En cause, deux facteurs aggravants : l'augmentation mondiale de la production de pétrole, soulignée dans le World Oil Outlook 2017 de l’OPEP, et un manque d’actions coordonnées des acteurs de l'industrie pétrolière pour la contrer.

En 2016, selon la Banque mondiale, le volume de gaz brûlé annuellement représentait 150 milliards de m3. 59 % de ce volume provenait de la Russie, du Nigéria, de l'Iran, de l'Irak, du Venezuela, des États-Unis et de l'Algérie.

En dépit de ce constat très alarmant, le défi n'est pas insurmontable et des solutions efficaces existent :

  • la réinjection du gaz dans le gisement pour renforcer la pression et améliorer le taux de récupération de pétrole ;
  • l’utilisation in situ comme source d'énergie pour les turbines électriques ;
  • la connexion des évacuations de gaz vers des pipelines existants ;
  • la création d’unités de gaz de pétrole liquéfié (GPL) ;
  • la transformation du gaz naturel en méthanol.

Pourquoi lutter contre le torchage du gaz ?

En parallèle de cet énorme gaspillage de gaz, équivalent à 3 % de la consommation annuelle de gaz dans l’Union européenne, s'ajoutent les émissions de CO2. Chaque année, 400 millions de tonnes de CO2 partiraient dans l'atmosphère à cause du torchage, d’après la Banque mondiale. Ce volume équivaut à 1,12 % des émissions mondiales de CO2.

Cette énergie « partie en fumée » inflige finalement une double peine : gâchis d’énergie et pollution inutile. De plus, le torchage va à l'encontre de toutes les initiatives politiques, économiques et industrielles visant à lutter efficacement contre le réchauffement climatique et préserver les ressources en consommant intelligemment.

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Par ailleurs, le torchage est à l’origine d’une pollution lumineuse qui désoriente les insectes et oiseaux nocturnes. Le bruit lié aux opérations peut également perturber les écosystèmes avoisinants le site d’extraction de pétrole.

Sur l'Homme, des conséquences sanitaires sont possibles puisque les fumigènes émettent divers composés dangereux pour la santé : particules de carbone, de monoxyde de carbone, benzène, composés organiques volatils (COV) et hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Quelques problèmes pulmonaires ont été recensés mais, à ce jour, l’impact sur la santé des individus vivant aux alentours des torchères n’est pas suffisamment étudié pour tirer de réelles conclusions.

Les efforts du partenariat mondial public-privé pour la réduction des gaz torchés (GGFR) commencent à payer. Le 17 juillet 2018, la Banque mondiale a annoncé que le torchage a reculé de 5 % en 2017, malgré une hausse de 0,5 % de la production de pétrole. 141 milliards de m3 de gaz ont été torchés en 2017, contre 148 milliards en 2016. Et c’est en Russie, premier pays au monde à pratiquer cette technique, que la baisse a été la plus significative. De quoi impacter positivement le marché du gaz à long terme ?

Source image à la Une : Flickr Creative Commons – Ken Doerr